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authenticité d'un tableau et responsabilité civile

Le titulaire du droit moral sur les œuvres d'un peintre a fait procéder à la saisie-contrefaçon d'un tableau intitulé "nature morte aux flacons" proposé à la vente aux enchères, dont il contestait l'authenticité, tout comme celle du certificat de l'expert daté de 1968 et produit à ladite vente.

Il a ensuite assigné la propriétaire de l'œuvre et le commissaire-priseur en contrefaçon et responsabilité civile pour atteinte à la réputation et au droit moral de l'artiste.

Pour s'opposer à la demande, la propriétaire de l'œuvre produisait un jugement correctionnel des années 1970 relaxant son père — qui lui avait transmis le tableau litigieux — des chefs d'escroquerie et de faux en matière artistique.

Sur la question de l'authenticité, la Cour de cassation confirme la Cour d'appel qui disait qu'il n'existait pas d'éléments nouveaux remettant en cause la décision correctionnelle et qui serait de nature à établir la fausseté de l'œuvre.

En revanche, elle casse la décision de la Cour d'appel sur la question de la responsabilité du commissaire-priseur et de la propriétaire de l'œuvre. En effet, la juridiction d'appel aurait dû rechercher s'il n'existait pas un fait distinct de la contrefaçon de nature à engager cette responsabilité, en l'espèce le fait d'avoir présenté sans la moindre réserve un tableau dont l'authenticité était au moins douteuse du fait des opinions divergentes émises à l'occasion de la procédure correctionnelle.

 

(Cassation, 16 mai 2013, pourvoi 11-14434)

protection de droits d'auteur indépendante de celle du pays d'origine

Par un arrêt du 10 avril 2013, la Cour de cassation rappelle qu'au terme de l'article 5-2 de la Convention de Berne du 9 septembre 1886 pour la protection des œuvres littéraires et artistiques, la jouissance et l'exercice du droit d'auteur sont indépendants de l'existence de la protection dans le pays de l'origine de l'œuvre.

La Cour d'appel de Paris avait débouté un plaignant de ses demandes au titre du droit d'auteur en invoquant le fait que la Convention de Berne régit le contenu de la protection de l'auteur de l'œuvre, mais qu'elle ne fournit pas d'indication relative à la titularité des droits, leur acquisition ou leur cession, si bien que dans le silence du texte, il y a lieu de faire application de la règle française de conflit de loi.

La Cour de cassation censure donc cet arrêt, pour violation de l'article 5-2 de la Convention de Berne qui désigne expressément la loi du pays où la protection est réclamée. 

Ce n'est donc pas la règle française de conflit de droit qui s'applique, mais celle de la Convention de Berne qui renvoie en l'espèce à l'application de loi française en matière de droit d'auteur.

qualité d'artiste interprète et télé réalité

La Cour de cassation a rendu le 24 avril son arrêt dans l'affaire dite de "L'île de la tentation".

Les participants à la fameuse émission avaient obtenu la requalification en contrat de travail du "règlement participants" de l'émission, décision confirmée par la chambre suprême.

Ils avaient toutefois reproché à la cour d'appel de Versailles de leur avoir dénié la qualité d'artistes interprète.

Sur ce point également, la Cour de cassation confirme l'arrêt d'appel.

Les participants à l'émission n'avaient en effet aucun rôle à jouer ni aucun texte à dire. Il ne leur était demandé que d'être eux-mêmes et d'exprimer leurs réactions face aux situations auxquelles ils étaient confrontés, et le caractère artificiel de ces situations et de leur enchaînement ne suffisait pas à leur donner la qualité d'acteurs, leur prestation n'impliquant aucune interprétation.

 

La présomption de titularité des droits

Une agence de voyage qui présentait plusieurs photographies pour illustrer son site internet avait assigné un concurrent en contrefaçon, action rejetée par la Cour d'appel au motif que la demanderesse ne démontrait ni que les photographies avaient été divulguées sous son nom, ni qu'elle avait été à l'origine de leur réalisation.

Par un arrêt du 10 avril 2013, la Cour de cassation casse cette décision pour manque de base légale. La Cour d'appel n'a pas recherché si l'agence de voyage exploitait de façon paisible et non équivoque les photographies sous son nom, en sorte qu'en l'absence de revendication de la ou les personnes les ayant réalisées, elle était présumée titulaire des droits patrimoniaux à l'égard des tiers recherchés en contrefaçon.

Celui qui exploite une œuvre de façon paisible et ostensible est donc présumé en détenir les droits patrimoniaux, lesquels ne pourraient lui être contestés que par l'auteur en personne.

 

le caractère impératif de l'écrit en matière d'édition

La cession des droits en matière d'édition nécessite un écrit au terme de l'article L. 131-2 du code de la propriété intellectuelle, chacun des droits cédés devant par ailleurs faire l'objet d'une mention distincte selon l'article L. 131-3 du même code.

La Cour de cassation vient, par un arrêt du 3 avril 2013, de rappeler le caractère impératif de l'écrit, en déboutant une société d'édition qui prétendait bénéficier d'une cession de droits d'auteur. En effet, le contrat n'était ni signé ni paraphé par les deux éditeurs prétendus, et les aveux judiciaires et extrajudiciaires produits ne pouvaient suffire à établir à leur profit l'existence d'une cession de droits d'auteur dont le domaine d'exploitation doit être délimité conformément aux prescriptions de l'article L. 131-3 précité.

Ainsi, le fait même que les auteurs aient sollicité le paiement d'avances sur leur redevances éditoriales ne pouvait constituer un élément se substituant au contrat écrit pour faire admettre l'existence d'une telle cession.

contrefaçon et internet, question préjudicielle

La Cour de cassation attend de la Cour de Justice de l'Union Européenne la réponse à une importante question préjudicielle.

Le Tribunal de grande instance de Paris avait été saisi d'une demande en contrefaçon par le propriétaire des droits sur la fameuse photographie du "Che au béret et à l'étoile" qui en avait constaté la reproduction sur des t-shirt proposés à la vente sur le site internet d'une société américaine. Cette dernière avait soulevé l'incompétence des juridicitions françaises au profit des juridictions américaines, et a été suivie par la Cour d'appel.

Or, dans un arrêt du 5 avril 2012, la Cour de cassation avait posé à la Cour de Justice de l'Union Européenne les questions suivantes :

 

1) En cas d'atteinte aux droits patrimoniaux d'auteur au moyen de contenus mis en ligne sur un site internet,

- la personne qui s'estime lésée a la faculté d'introduire une action en responsabilité devant les juridicitons de chaque Etat membre sur le territoire duquel un contenu mis en ligne est accesible ou l'a été, à l'effet d'obtenir réparation du seul dommage causé sur le territoire de l'Etat membre de la juridiction saisie,

ou

- il faut, en outre, que ces contenus soient ou aient été destinés au public situé sur le territoire de cet Etat membre, ou bien qu'un autre lien de rattachement soit caractérisé ?

 

2) La question posée au 1° doit-elle recevoir la même réponse lorsque l'atteinte alléguée aux droits patrimoniaux d'auteur résulte non pas de la mise en ligne d'un contenu dématérialisé, mais de l'offre en ligne d'un support matériel reproduisant ce contenu ?

 

La Cour de cassation dans son arrêt du 20 mars 2013 surseoit par conséquent à statuer dans l'affaire de la photo du "Che" en attendant la réponse à sa question préjudicielle du 5 avril 2012.

 

preuve de la qualité d'auteur d'une photographie

La preuve de la qualité d'auteur est un exercice parfois difficile.

La Cour de cassation l'a encore récemment démontré dans un arrêt du 20 mars 2013.

La plaignante qui soutenait être l'auteur de trois photographies d'une altercation réalisées sur le plateau de l'émission de télévision "Ca se discute", vendues au magazine Télé Star, reprochait à la Cour d'appel d'avoir déclaré son action irrecevable.

Elle expliquait que la personne qui apparaissait sur la facture en qualité d'auteur ne pouvait l'être matériellement, puisque l'on distinguait son épaule sur l'une des photographies, et qu'il ne pouvait ainsi en être simultanément l'auteur et l'objet. D'ailleurs cette personne avait fourni une attestation dans laquelle il niait être l'auteur des clichés.

La Cour de cassation rejette pourtant le pourvoi en retenant que la Cour d'appel a justement jugé que l'attestation par laquelle l'auteur présumé déniait avoir pris les photographies litigieuses ne pouvait faire foi, ce dernier s'étant avéré être le concubin de la plaignante, cette dernière ne parvenant donc pas à démontrer sa qualité d'auteur.

la cession de droit sur des planches lithographiques n'emporte pas cession du droit d'auteur sur l'œuvre originale

Un artiste peintre découvre que ses œuvres ont été reproduites sur divers supports et présentées dans le catalogue d'une vente aux enchères organisée par un célèbre commissaire priseur, qu'il assigne en contrefaçon de ses droits d'auteur et en concurrence déloyale, en même temps que la galerie qui a mis en vente les pièces litigieuses.

Cette dernière se pourvoit en cassation, reprochant à la cour d'appel qui l'a condamnée de n'avoir pas pris en compte la cession de droits patrimoniaux intervenue entre l'artiste et différentes sociétés. Du fait de ces cessions, selon la galeriste, l'héritière de l'auteur qui avait repris l'action était dépourvue de qualité pour agir.

La Cour de cassation rejette le pourvoi. En effet, la cour d'appel n'avait pas à s'interroger sur la portée des cessions invoquées, après avoir constaté que celles-ci avaient pour objet non des œuvres peintes mais des planches lithographiques. (Cour de cass. 1ere chambre civile, 13 décembre 2012)

 

 

nullité de la saisie-contrefaçon

Il est courant dans les procédures de contrefaçon de voir le défendeur opposer au titulaire des droits la nullité de la saisie-contrefaçon opérée par l'huissier.

Il est plus rare en revanche de voir le tribunal y faire droit, une telle nullité risquant de priver le demandeur de son unique moyen de preuve.

Un arrêt de la cour de cassation du 31 octobre 2012 vient pourtant de confirmer la nullité d'une saisie-contrefaçon, au motif cumulé que l'huissier instrumentaire ne s'était pas identifié en opérant sous le nom de sa société d'huissiers associés, et qu'il n'avait pas d'autre part préalablement remis au saisi l'ordonnance ayant autorisé la saisie-contrefaçon.

S'agissant d'une nullité formelle, le titulaire des droits avait argué de l'absence de griefs engendrés par ces irrégularités. 

Par une formule laconique, la cour de cassation estime que la cour d'appel a pu juger souverainement que ces manquements avaient porté atteinte aux intérêts de la défenderesse, rappelant ainsi le caractère exceptionnel de la saisie-contrefaçon, véritable perquisition civile, dont la pratique suppose un respect scrupuleux des formes prescrites.

logiciel, droit d'auteur et originalité

La protection d'un logiciel sur le fondement de l'article L.112-2-13° du code de la propriété intellectuelle pose les mêmes questions que celles liées à la protection du droit d'auteur en général, et notamment celle de l'originalité de l'œuvre.

C'est ce que rappelle la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 17 octobre qui annule une décision de la Cour d'appel d'Aix en Provence.

Cette dernière avait en effet reconnu l'originalité d'un logiciel au motif qu'il apportait "une solution particulière à la gestion des études d'huissiers de justice".

Motivation insuffisante, juge la Cour de cassation pour laquelle l'originalité requiert que les choix opérés témoignent d'un apport intellectuel propre et d'un effort personnalisé de celui qui a élaboré le logiciel litigieux.

droits d'auteur, ressemblances et dissemblances

La créatrice d'un modèle de sac à main dénommé "Paillette" avait attrait un importateur et son distributeur en contrefaçon de ses droits d'auteur sur cette création, le débat étant limité à la question de la ressemblance des sacs importés avec le modèle original.

La cour de cassation a confirmé le 26 septembre 2012 la condamnation en contrefaçon prononcée par la Cour d'appel de Versailles.

Les sacs incriminés reprennent en effet les caractéristiques du modèle original en ce qu'ils sont, dans une disposition identique, revêtus de six rangs de paillettes cousus autour du bas du sac et de rangs de paillettes sur les anses se poursuivant le long du corps. Ils présentent par ailleurs un fond rectangulaire mou, des côtés gansés à l'intérieur à l'aide d'un galon plat, un montage piqué retourné du fond et des côtés, une finition rembordée et une poche intérieure.

Ces ressemblances relevées par la cour d'appel justifient sa décision.

Peu importent les différences invoquées tenant à la taille, la dimension des sacs, la souplesse de la toile, la largeur et la longueur des poignées, la conception des poches intérieures.

Un arrêt qui illustre à nouveau que la contrefaçon se juge sur les ressemblances et non les dissemblances.

La difficulté de la reconnaissance de la qualité de coauteur d'une œuvre audiovisuelle hors présomption légale

En matière d'œuvre audiovisuelle, l'article L.113-7 du code de la propriété intellectuelle présume coauteurs :

1° L'auteur du scénario

2° L'auteur de l'adaptation

3° L'auteur du texte parlé

4° L'auteur des compositions musicales spécialement réalisées pour l'œuvre

5° Le réalisateur

Lorsque l'œuvre audiovisuelle est tirée d'une œuvre ou d'un scénario préexistant encore protégés, les auteurs de l'œuvre originaire sont assimilés aux auteurs de l'œuvre nouvelle.

L'assistant réalisateur adjoint du film "Bienvenue chez les Ch'tis" avait assigné le producteur délégué du film pour revendiquer la qualité de coauteur, arguant avoir apporté à la réalisation du film des contributions incontestables.

La cour d'appel, confirmant le tribunal par un arrêt du 4 juillet 2012, le déboute de cette demande selon une jurisprudence courante, au motif qu'il ne démontrait pas avoir eu un rôle autre que celui dévolu à un technicien, ni avoir marqué de sa personnalité les cinq scènes revendiquées représentant selon lui 35 secondes de séquences audiovisuelles intégrées dans le montage final du film.

Ne bénéficiant pas de la présomption légale de l'article L.113-7, le technicien se devait d'apporter la preuve d'un apport original.

Or, la cour, après visionnage des scènes revendiquées, constate que les plans se présentent comme prévu au scénario et que les effets de vitesse ou plan large puis serrés relèvent de choix techniques et ne sauraient procéder d'une véritable œuvre créatrice relevant d'une protection au titre du droit d'auteur.

Les délicates notions de reproduction accessoire et d'œuvre composite

Au terme d'une décision rendue le 12 juin 2012, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par la société Getty Images France contre un arrêt rendu par la Cour d'appel de Paris, qui l'avait condamnée pour la diffusion de deux photographies représentant un fauteuil et une chaise longue créés par Le Corbusier en 1927 et 1929.

Sans s'arrêter aux arguments purement techniques de cet arrêt, la Cour de cassation rappelle en premier lieu que la transmission des droits patrimoniaux de l'auteur est subordonnée à la condition que chacun des droits cédés fasse l'objet d'une mention distincte dans l'acte de cession, et que la cession du seul droit de fabrication des meubles n'emporte pas cession d'un droit d'exploitation.

La société Getty reprochait surtout à l'arrêt d'avoir déclaré ses photographies contrefaisantes alors que les meubles représentés n'y avaient, selon elle, qu'un caractère accessoire par rapport au sujet traité. D'autre part, selon le pourvoi, les photographies incriminées devaient s'analyser comme des œuvres composites, si bien que l'autorisation de l'auteur de l'œuvre première n'était par requise au stade de la création, mais seulement à celui de l'exploitation commerciale, l'auteur du pourvoi l'auteur du pourvoi contestant s'être livré à une telle exploitation.

Cependant, dit la juridiction suprême, la Cour d'appel avait justement répondu que les meubles incriminés sont "nettement visibles et parfaitement identifiables" sur les photographies, qui font par ailleurs bel et bien l'objet d'une exploitation commerciale. En tout état de cause, une œuvre composite ne peut être reproduite sans l'autorisation de l'auteur de l'œuvre préexistante,  de sorte que la condamnation prononcée est justifiée.

Cession implicite de droits d'auteur ?

Un reporter photographe d'une agence de presse avait laissé à cette dernière des archives photographiques, à charge pour elle de lui rétrocéder 25 % des sommes qu'elle retirerait de leur exploitation.

A la suite d'une expertise judiciaire obtenue en référé par le photographe, il s'est avéré que l'agence avait perdu de nombreuses photographies dites "point rouge" en considération de leur unicité, tandis que d'autres figuraient sur son site internet, sans qu'il ait jamais autorisé ni leur diffusion par cette voie, ni leur numérisation préalable.

La Cour d'appel a condamné l'agence à des dommages-intérêts, jugés excessifs par l'agence, en raison de la perte prouvée de 753 photographies. La Cour de cassation confirme la condamnation : c'est à juste titre que la juridiction du fond a considéré que le préjudice ne se réduisait pas à de simples pertes de chance de revenus à attendre d'une commercialisation, s'agissant de travaux irremplaçables à caractère unique, d'œuvres issue d'une grande implication affective et humaine.

 

Mais la Cour de cassation casse l'arrêt de la Cour d'appel en ce qu'elle a condamné l'agence au titre d'actes de contrefaçon du fait de la numérisation des photographies et de leur présentaiton sur son site internet. La Cour aurait dû rechercher si les numérisations et mises en ligne, effectuées avec la protection d'un système antipiratage, n'étaient pas impliquées, en l'absence de clause contraire, par le mandat reçu de commercialiser ces images et le besoin de permettre leur visualisation par des acheteurs potentiels.

Cet arrêt surprenant de la Cour de cassation rendu le 30 mai dernier énonce la possibilité d'une cession implicite d'un mode d'exploitation du droit d'auteur, en contradiction avec la jurisprudence habituelle en la matière.

De l'étendue de la cession d'une œuvre

L'auteur d'une photographie avait cédé ses droits de reproduction pour la réalisation d'une affiche destinée à dénoncer les franchises médicales. Il a découvert sur internet un blog reproduisant l'affiche sous un article intitulé "Franchises médicales, l'arnaque ?" et saisi le juge de proximité d'une action en contrefaçon à l'encontre du propriétaire du blog.

Le premier juge rejette la demande. Le photographe serait irrecevable à agir en défense de ses droits patrimoniaux selon lui car l'affiche reproduite serait une œuvre composite (c'est-à-dire en l'espèce une œuvre incorporant une œuvre préexistante) et que le photographe avait cédé ses droits pour la réalisation de l'œuvre dérivée.

La Cour de cassation censure cette décision par un arrêt du 16 mai 2012. En effet, le juge de proximité aurait dû rechercher si la cession consentie par le photographe couvrait la reproduction de l'affiche sur internet.

Rappelons que la transmission des droits de l'auteur est subordonnée à la condition que chacun des droits cédés fasse l'objet d'une mention distincte dans l'acte de cession, et que le domaine d'exploitation des droits soit défini.

Affaire Camille Claudel : le droit moral des ayants droit et la définition d'œuvre originale

La fameuse affaire Camille Claudel vient de connaître son dénouement à la suite du second arrêt de la Cour de cassation sur renvoi, rendu le 4 mai 2012.

Camille Claudel avait réalisé en 1902 une œuvre sculpturale, intitulée "La Vague", représentant, sur un socle en marbre, une vague en onyx prête à déferler sur un groupe de trois baigneuses. Les ayants droit de la célèbre sculpteuse avaient procédé à la saisie-contrefaçon d'un tirage de "La Vague", entièrement en bronze, numéroté 3/8, exposé dans une galerie en vue de sa vente aux enchères. Elles estimaient en effet que ce bronze constituait une reproduction illicite de l'œuvre.

La première question qui se posait était celle du contrôle de l'exercice du droit moral de l'auteur par ses ayants droit. Ces dernières reprochaient à la Cour d'appel de leur avoir refusé le droit de s'opposer à la reproduction en bronze, au motif qu'elles n'avaient pas proscrit le changement de matière dans un protocole d'accord passé auparavant, ni n'avaient protesté contre la mention de ce tirage en bronze dans le catalogue raisonné, alors selon elles que le droit moral ne pouvait faire l'objet d'une renonciation. En toute hypothèse, toujours selon les ayants droit, une renonciation ne saurait se présumer et ne pourrait résulter que d'un acte sans équivoque. Or, toute modification apportée à l'œuvre, quelle qu'en soit l'importance, porte atteinte au droit au respect de l'œuvre, et les débats n'avaient pas apporté la preuve que Camille Claudel ait exprimé, de son vivant, l'intention de faire réaliser un tirage en bronze.

Cependant, la fabrication d'un plâtre de facture différente, inutile à une réalisation en onyx, en 1897, permettait de penser que l'artiste avait envisagé un tirage en bronze et que Camille Claudel ne s'était pas opposée de son vivant à tout tirage en bronze. En le constatant, la Cour d'appel a donc procédé, selon la Cour de cassation, aux recherches nécessaires et considéré à juste titre que la réalisation de "La Vague" en bronze, n'avait pas méconnu la volonté de l'auteur et ne portait donc pas atteinte à l'intégrité de l'œuvre.

En revanche, c'est sur un second point que la Cour de cassation censure la Cour d'appel : celui de la définition d'œuvre originale. En effet, seuls constituent des exemplaires originaux les épreuves en bronze à tirage limité coulées à partir du modèle en plâtre ou en terre cuite, réalisé par le sculpteur personnellement, de telle sorte que, dans leur exécution même, ces supports matériels de l'œuvre portent l'empreinte de la personnalité de leur auteur et se distinguent par là d'une simple reproduction.

Or, pour rejeter les demandes des ayants droit contre l'existence d'un certificat d'authenticité qualifiant le tirage en bronze litigieux d'original, la Cour d'appel a relevé que le tirage en bronze était en nombre limité, que l'exactitude des traits n'en est pas contestée et qu'ainsi, bien que réalisé postérieurement au décès de l'artiste, il doit être considéré comme original.

Ce faisant, et alors qu'elle avait relevé elle-même que ce tirage litigieux avait été obtenu par surmoulage, la Cour d'appel a violé l'article L.121-1 du code de la propriété intellectuelle. Un bronze réalisé dans ces conditions ne peut être qualifié d'original.

Oeuvre de commande et droit moral

Un graphiste chargé en 1998 de la réalisation d'un visuel par une société CCN reprochait à cette dernière d'avoir poursuivi, en violation de ses droits d'auteur, l'exploitation de ces documents après la fin de leur collaboration. Il avait déposé en ce sens une plainte pénale en contrefaçon, laquelle fut classée sans suite.

La société CCN l'avait alors poursuivi en responsabilité, estimant que sa plainte pour contrefaçon était téméraire, et avait obtenu la somme de 3 000 euros. La Cour d'appel avait en effet rejeté la demande reconventionnelle du graphiste, qualifiant le visuel litigieux d'œuvre de commande dont la cession s'était réalisée, en vertu de l'article L. 132-31 du code de la propriété intellectuelle, au profit de la société CCN dès sa création en 1998.

Par un arrêt du 4 mai 2012, la Cour de cassation censure cette décision : le graphiste invoquait en effet également une atteinte à son droit moral d'auteur, lequel est incessible. La Cour d'appel a par conséquent violé l'article L. 132-31 qui ne prévoit que la cession des droits d'exploitation, et pour cause : le droit moral de l'auteur est inaliénable.

La qualité d'auteur et la présomption de titularité des droits

Un créateur de modèles de sandales fabriquées en Thaïlande et commercialisées en France par l'intermédiaire d'une société "La Marine" a fait assigner en contrefaçon et concurrence déloyale les tenanciers d'un stand qui commercialisaient lors d'une braderie des modèles aux caractéristiques identiques.

La société "La Marine" a été déboutée de son action en concurrence déloyale, la Cour jugeant que la présentation des produits ne générait pas de risque de confusion dans l'esprit du public, ce que confirme la Cour de cassation dans son arrêt du 4 mai 2012.

En revanche, le créateur, également débouté de son action en contrefaçon, obtient pour sa part gain de cause en cassation. La Cour d'appel avait considéré qu'il n'apportait pas d'éléments de nature à justifier de sa qualité d'auteur. Il s'était ainsi trouvé dans l'impossibilité de fournir des explications sur le processus de création des sandales, ne possédait ni étude, ni croquis ou modèles. Selon la Cour d'appel, il n'était pas présumé titulaire des droits d'exploitation des modèles litigieux, car un tiers à la cause attestait avoir vendu ces mêmes modèles avant lui.

Cependant, il justifiait, selon la Cour de cassation, d'actes non équivoques d'exploitation en France. Aussi la Cour d'appel a violé l'article 113-5 du code de la propriété intellectuelle en vertu duquel l'exploitation non équivoque d'une œuvre par une personne physique ou morale sous son nom fait présumer à l'égard du tiers recherché pour contrefaçon que cette personne est titulaire sur l'œuvre du droit de propriété incorporelle. Un tiers à la cause qui ne conteste pas cette titularité ne saurait mettre en échec cette présomption.

Le droit d'auteur et la notion de communication au public

Deux arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne du 15 mars 2012 définissent la notion de "communication au public".

La première affaire concerne un dentiste, assigné devant la juridiction italienne pour avoir diffusé de la musique d'ambiance protégée par le droit d'auteur. La cour italienne a demandé, par voie de question préjudicielle, si la diffusion dans un cabinet dentaire devait être considérée comme une communication au public.

Non répond la CJUE, eu égard au nombre de personnes destinataires potentielles, au fait qu'il s'agit d'un ensemble déterminé (la clientèle du cabinet) et à l'absence de caractère lucratif.

Les mêmes critères conduisent la CJUE à la conclusion contraire, s'agissant d'un hôtelier qui diffuse des œuvres protégées dans les chambres de son hôtel. Il fournit dans ses chambres des postes de radio et de télévision, ses clients constituent un ensemble indéterminé de destinataires potentiels, en nombre suffisamment important, outre que la diffusion revêt pour l'exploitant hôtelier un caractère lucratif puisqu'elle contribue à relever son niveau. L'exploitant d'un établissement hôtelier est donc, pour la CJUE, un "utilisateur" réalisant un "acte de communication au public". Il doit, de ce fait, verser une rémunération équitable conformément à l'article 8 paragraphe 2 de la directive 2006/115.

Violation de droit de la propriété intellectuelle et Internet

La Cour de Justice de l'Union Européenne a répondu le 19 avril dernier à une question préjudicielle relative à l'application de la directive 2006/24/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 sur la conservation de données générées ou traitées dans le cadre de la fourniture de services de communications électroniques accessibles au public.

La société Bonnier Audio, société d'édition titulaire de droits exclusifs de reproduction, d'édition et de mise à disposition du public de 27 ouvrages se présentant sous forme de livres audio, estimait que leur diffusion au moyen d'un serveur FTP (file transfer protocol) qui permet le partage de fichiers et le transfert de données entre ordinateurs connectés à Internet, avait porté atteinte à ses droits exclusifs. Elle avait saisi le Tribunal de première instance de Solna (Suède) d'une demande d'injonction aux fins de communication des nom et adresse de la personne faisant usage de l'adresse IP à partir de laquelle l'échange illicite de fichiers s'est produit. La Cour d'appel de Svea a jugé qu'aucune disposition de la directive 2006/24 ne faisait obstacle à ce que l'injonction soit délivrée au profit d'autres personnes que d'une personne publique, mais elle a annulé l'injonction tout comme la demande de saisine de la CJUE à titre préjudiciel, au motif que les sociétés éditrices ne rapportaient pas l'existence d'indices réels d'atteinte à un droit de propriété intellectuelle. Les demandeurs se sont alors pourvus en cassation. La juridiction suprême suédoise a estimé qu'il subsistait un doute sur la question de savoir si le droit de l'Union s'oppose à l'application d'un article de la loi interne sur le droit d'auteur.

La question posée était de savoir si cette directive 2006/24 s'opposait à l'application d'un législation nationale relative au respect des droits de propriété intellectuelle qui, aux fins d'identification d'un abonné à Internet ou d'un utilisateur d'Internet, permet d'enjoindre à un fournisseur d'accès Internet de communiquer au titulaire d'un droit d'auteur ou à son ayant droit l'identité de l'abonné dont l'adresse IP aurait servi à l'atteinte audit droit.

La directive vise à harmoniser les dispositions du droit interne des Etats membres, relatives aux obligations des fournisseurs en matière de traitement et de conservation des données à des fins de recherche, de détection et de poursuite d'infractions graves, telles que définies par chaque Etat membre dans son droit interne.

Or, la législation en cause se rapportait à la transmission de données dans le cadre d'une procédure civile, aux fins de constater une atteinte à un droit de propriété intellectuelle, soit un objectif différent de celui visé par la directive 2006/24.

C'est pourquoi, la CJUE considère dénué de pertinence le fait que l'Etat concerné n'ai pas encore transposé cette directive dans son droit interne alors que le délai pour ce faire était expiré.

Elle relève que la demande de l'éditeur constitue un traitement de données à caractère personnel au sens de l'article 2 de la directive 2002/58 et que la demande de communiquer des données à caractère personnel en vue d'assurer la protection effective de droits d'auteur relève, de par son objet, du champ d'application de la directive 2004/48.

La loi suédoise exige, pour qu'une telle injonction puisse être ordonnée, des indices réels d'atteinte au droit de propriété intellectuelle sur une œuvre et que l'information demandée soit susceptible de faciliter l'enquête sur la violation du droit d'auteur, et que les raisons motivant cette injonction soient d'un intérêt supérieur aux inconvénients ou autres préjudices qu'elle peut entraîner pour son destinataire. La CJUE considère qu'ainsi formulée, cette législation assure un juste équilibre entre la protection du droit de la propriété intellectuelle, dont jouissent les titulaires de droit d'auteur, et la protection de données à caractère personnel dont bénéficie un abonné ou un utilisateur d'Internet.

 

 

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